Octobre 2025 : l’or franchit 4 000 $ l’once — nécessité, pas spéculation
Un seuil symbolique dans un monde qui vacille
Ce mois d’octobre 2025, l’or a franchi la barre symbolique des 4 000 $ l’once, un seuil qui semblait jusqu’ici réservé aux projections les plus audacieuses. Pour certains, ce niveau représente un signal de prudence ; pour d’autres, c’est la preuve éclatante que la confiance dans les monnaies fiduciaires s’effrite. L’or ne grimpe pas par spéculation, il grimpe par nécessité. Dans un monde où les équilibres vacillent, le métal jaune reste la seule valeur que ni la conjoncture ni les bilans ne peuvent effacer.
Une dynamique structurelle, pas un pic de bulle
Résistances brisées et flux d’investissement
Depuis la fin de 2022, l’or a brisé quarante et un seuils de résistance, enregistrant la progression la plus rapide de la décennie. Le World Gold Council rapporte que les investissements dans les ETF adossés à de l’or ont bondi de 221,7 tonnes au troisième trimestre 2025 (≈ 26 milliards $). Cette demande record a propulsé les avoirs mondiaux à moins de 2 % de leur plus haut historique de 2020. Sur le plan physique, la tension se fait déjà sentir : les barres d’investissement se raréfient et les primes s’élargissent, surtout sur les formats de 5 à 100 grammes.
Banques centrales : la prudence devient stratégie
Europe : diversification et socles stratégiques
En Europe, les banques centrales renforcent leur exposition à l’or. Une enquête de l’OMFIF (juin 2025) indique qu’un tiers d’entre elles prévoit d’augmenter leurs réserves dans les deux ans — un niveau inédit depuis 2019. À Francfort, un haut responsable de la BCE reconnaissait récemment que le métal joue désormais un rôle de diversification « indispensable dans un contexte de risque géopolitique persistant ». À Bruxelles, la Banque nationale de Belgique maintient la sienne autour de 227 tonnes, un socle stratégique jugé « incompressible ». La maxime de César, « Horum omnium fortissimi sunt Belgae », n’a jamais semblé plus actuelle : la prudence belge n’est pas timidité, c’est clairvoyance.
Devises sous pression, réflexe refuge
Le dollar, affaibli par des déficits publics records et des perspectives d’assouplissement monétaire, alimente la hausse. « Gold has shown in the past that it is an asset of choice when tariff tensions are ratcheted up », rappelait récemment l’analyste Tim Waterer (KCM Trade). Ce constat illustre la période : chaque tension, chaque doute sur la solidité des devises ou des marchés déclenche un réflexe refuge. La demande d’or n’est plus un mouvement spéculatif, mais un vote silencieux contre la fragilité du système.
L’offre physique se tend : la rareté s’installe
Pourtant, l’offre physique ne suit plus. Certains grands acteurs industriels, comme Umicore, ont choisi de liquider leurs stocks pour transformer l’or en liquidités. Cette décision, comptable, réduit la quantité de métal disponible sur le marché et accentue la rareté du stock réel. En parallèle, le recyclage industriel ne compense pas la ruée vers la détention directe. Dans les ateliers de raffinage, les commandes augmentent plus vite que les entrées de matière première. Celui qui détient le métal, le vrai, possède désormais le levier stratégique.
Les limites du « métal loué »
Le modèle du « métal loué » (gold leasing), très en vogue dans les grands groupes financiers, atteint ses limites. Louer de l’or revient à emprunter la stabilité dans un monde instable. Quand le prix grimpe, restituer la même quantité devient un casse-tête : la marge fond, les coûts de couverture explosent, et les primes imposées au client final deviennent insoutenables. Le système tient tant que la confiance demeure. Dans une ère de hausses continues et de tensions sur les livraisons physiques, ce modèle s’érode inexorablement.
Détention directe : souveraineté patrimoniale
À l’inverse, ceux qui détiennent leur métal en propre — particuliers, collectionneurs, maisons spécialisées — consolident leur souveraineté. Ils n’ont pas besoin de se couvrir : leur couverture, c’est le métal lui-même. Ils ne dépendent pas des taux : leur rendement, c’est la valeur du temps. Ils ne spéculent pas : ils conservent. C’est cette philosophie que défend Gold & Silver Company depuis plus d’une décennie : redonner à la possession du métal une dimension patrimoniale, indépendante et tangible.
Leçons des cycles précédents
Le parallèle avec les cycles précédents est frappant. En 2011, on annonçait déjà « la fin du cycle » à 1 900 $ ; trois ans plus tard, ceux qui avaient tenu sont devenus les pionniers du rebond. Aujourd’hui, la même psychologie se répète : les analystes redoutent la correction, mais l’or continue d’avancer. La « peur du sommet » est souvent le signe que le sommet n’est pas encore là.
Conclusion : le vrai risque
Peter Drucker écrivait : « The best way to predict the future is to create it. » L’or, depuis l’Antiquité, n’a pas besoin de le prédire : il l’incarne. Les cycles changent, les devises se renouvellent, mais la valeur du métal demeure. Alors que les écrans s’affolent, une vérité simple reste : le vrai risque n’est pas d’avoir trop d’or, mais d’en avoir trop peu. Le temps jugera ceux qui auront douté. Quant à ceux qui auront tenu la ligne, on ne les appellera pas spéculateurs, mais gardiens du réel.
Vocabulaire du métal
- Once troy
- Unité de mesure internationale des métaux précieux (1 once troy = 31,1035 grammes).
- ETF (Exchange Traded Fund)
- Fonds coté en bourse qui réplique le prix de l’or sans livrer de métal physique.
- OMFIF
- Official Monetary and Financial Institutions Forum : think tank qui publie des études sur les politiques monétaires et les réserves d’or des banques centrales.
- LBMA
- London Bullion Market Association : organisme mondial de référence qui certifie les raffineries et fixe les standards de pureté des lingots.
- Prime
- Différence entre le prix « spot » et le prix réel payé par l’acheteur (inclut fabrication, logistique et rareté).
- Raffinage
- Procédé de purification du métal brut pour atteindre la pureté d’investissement (souvent 999,9 pour l’or).
- Métal loué / gold leasing
- Prêt d’or physique par une banque à un industriel, remboursé en métal et non en argent.
- Réserve physique
- Quantité réelle d’or détenue en propre, par opposition aux contrats papier ou produits dérivés.
- Diversification monétaire
- Stratégie des banques centrales pour réduire leur dépendance au dollar en augmentant la part d’or.
- Métal d’investissement
- Or, argent, platine ou palladium détenus sous forme de lingots, pièces ou barres pour préserver la valeur.